l'Atelier l'Écriture

atelier écriture

la petite histoire de l’atelier : 

au commencement le mot atelier désignait le lieu de travail du menuisier, solitaire et artisanal, le passage de la matière brute du bois à la matière élaborée de l’objet ou du meuble.
puis vient le temps des ateliers d’artistes, travail collectif et artistique, le passage du « rien » à l’œuvre visible.
puis ce fut le temps et jusqu’à maintenant des ateliers d’artisanats divers et le plus souvent de pratique collective et celui des ateliers d’artistes le plus souvent solitaires.


l’atelier d’écriture est tout à la fois un lieu artisanal : puiser dans la langue commune l’élaboration de sa propre langue et un lieu de création artistique : passer de la page blanche à l’œuvre écrite. 
le mot  « œuvre », ici,  doit être entendu aussi bien comme le mot « ouvrage ».
 / art et artisanat ayant parties liées / c’est le travail d’une matière commune (lexique, grammaire, usages) avec les outils de la langue (syntaxe rythme et structure) jusqu’à la parution d’une matière singulière : un texte. 
et le texte créant ainsi un auteur.
le mot « auteur » revenu vers ses origines : celui / celle qui - s’autorise, qui - ose. 
qui s’autorise à dire.
qui ose porter une parole inédite. 

l’atelier est le lieu d’émergence et de travail d’une parole de langue commune en quête d’un auteur de langue singulière.

l’atelier est un lieu, il est
        « a womb with a view » /. Dylan Thomas
        une matrice avec vue

 

si nous préférons dire : l’atelier l’écriture plutôt que « l’atelier d’écriture », c’est pour essayer d’être au plus près de ce qui se passe à la table. 

tout à la fois un travail de la langue – rythme, formes, sémantique, etc. – (travail de l’atelier) et un travail dans l’inconnu de soi - la part obscure, l’englouti des mémoires, l’énigme, etc. - (travail de l’écriture).
le travail de la langue est un travail solitaire.

tout à la fois un lieu d’écoute de la langue des autres et le lieu d’écoute de sa propre langue .

c’est une écoute qui fait retour / par la parole / pour tenter d’éclaircir avec l’auteur « l’archi-texture-sensible » de son texte et ainsi, de lui ouvrir des pistes de compréhension de l’alchimie à l’œuvre dans son écriture ; non pas de questionner d’où il écrit – ceci n’appartient qu’à l’auteur- mais d’interroger le comment ça s’écrit ce qui s’écrit et que vient « dire » le texte à ses lecteurs. 

et de cette compréhension, chacun.e a un peu plus de pouvoir à poursuivre le texte ou bien à le recoudre, le faire et le défaire et le refaire encore. ou bien tourner la page. 
le travail d’écoute et d’élaboration d’une critique est un travail collectif. 


l’atelier l’écriture engage l’être qui s’y risque. 
(ce n’est pas grave c’est seulement sérieux)


l’atelier l’écriture est un lieu solitaire et solidaire.
(c’est une expérience de solitude en partage)


l’atelier l’écriture est une chambre à soi.
en compagnie discrète et présente des autres.
dans le sceau des remuements de la langue.
dans l’articulation claire d’une voix. 


l’atelier l’écriture a pour horizon que chacun.e fasse « tenir sa page ».
et qu’ainsi, il, elle « se tienne »… 

 

La page doit tenir ; qu’elle soit vraie n’entraîne pas forcément qu’elle sonne juste. 
D’où la menuiserie qui suit l’état premier du poème. Il ne s’agit pas de le ramener à une harmonie classique ou de correspondre à des règles extérieures préétablies.
Il a créé sa propre musique y compris stridence et larsen, brouillage ou son faible, quasi inaudible.
(…)
avec ses dérapages, rugosités, sautes de tension, silence et bruit. autant dire que cela demande pas mal d’écoutes et de tâtonnements avant de fixer un état définitif. Il n’y a pas de honte à brouillonner longtemps, sauf à se croire élu des dieux, ce qui est bien plus risqué que de cent fois sur le métier etc. L’existence des dieux est vraiment trop peu sûre.

Antoine Emaz 
 

la neige tombe
           nous avançons
chacun
dans sa neige

André du Bouchet

 

Je ne fais pas de différence entre un poème et une poignée de mains

Paul Celan